(Je remercie Liliane Messika pour sa lecture attentive et ses conseils avisés)
En 2004, l’office des publications de l’Union Européenne a mis en ligne le rapport du groupe des Sages intitulé Le dialogue entre les peuples et les cultures dans l’espace euro-méditerranéen (voir ici). Ce groupe, constitué à l’initiative de Romano Prodi, est co-dirigé par Jean Daniel et Assia Alaoui Bensalah. À côté de savants comme Malek Chebel et Umberto Eco, de dissidents comme Pedrag Matvejevic ou encore une militante juive pro-palestinienne, Simone Susskind, on trouve, par exemple, Tariq Ramadan.
Ce texte précède toute une série de rapports au sein du vaste projet européen Alliance des Civilisations. Ce projet est le fruit des accords de Barcelone, élaborés en 1995 lors d’une conférence internationale, en présence de 15 pays membres de l’UE et de 12 pays du sud de la Méditerranée. Cette conférence a défini trois volets de coopération : politique (sécuritaire), économique et culturel. Les pays du Sud sont essentiellement des États arabo-musulmans, deux îles qui ne le sont pas : Chypre et Malte, et un pays qui n’existe pas : « l’Autorité palestinienne ».
« L’alliance des civilisations est un titre pompeux à la prétention œcuménique. Il s’inscrit ouvertement dans l’interdiscours polémique. Il pourrait faire écho au livre de Samuel Huntington, sorti en 1996, soit un an après les accords de Barcelone. C’est un ouvrage intitulé The Clash of Civilisations and the Remaking of World Order traduit en français par Choc des civilisations. Huntington propose une description géopolitique du monde contemporain, non pas en fonction d’oppositions idéologiques, mais articulé autour des oppositions culturelles ou, comme dit l’auteur, civilisationnelles.
Les membres de ce groupe, qui semble hétéroclite en termes culturel et géographique, ont une particularité : ils ont des rapports troubles avec le judaïsme et avec le sionisme. C’est le cas de Jean Daniel, pour qui le judaïsme est une prison et Israël une puissance occupante, ou de Tariq Ramadan qui déjà en 2003 faisait la liste des « intellectuels juifs défenseurs d’Israël », une accusation sous sa plume, et justifiait les attentats terroristes commis par des Palestiniens. C’est aussi le cas de Simone Susskind, qui se dit « sioniste » de gauche. Mais son discours est antisioniste : un peuple « occupe » la terre de l’autre peuple et Yasser Arafat était un véritable partenaire de paix[1]. Idem de l’avocat Ahmed Camal Aboulmagd, intellectuel égyptien, ex-conseiller du président Sadat. La lecture de leurs textes montre que si la composition du groupe semble diversifiée, ses membres sont homogènes lorsqu’il s’agit d’Israël.
De manière indirecte, dans ce texte comme dans les suivants, l’État hébreu est toujours désigné comme le coupable de l’absence de paix et d’alliance civilisationnelle. Il n’aura donc pas sa place dans ce que Romano Prodi a appelé « un espace de prospérité et de bon voisinage – un « cercle d’amis » – caractérisé par des relations étroites et pacifiques fondées sur la coopération ».
L’analyse détaillée de tous les rapports de ce groupe est longue. Pour commencer, je voudrais aborder dans leurs grandes lignes les éléments de langage utilisés dans le texte.
La langue de bois
La formule « langue de bois » renvoie à une multiplicité de phénomènes langagiers. Si certains spécialistes proposent de voir dans la langue de bois le contraire de ce qui est, d’autres parlent d’une langue euphémisée, une langue du « politiquement correct », une langue au service d’un pouvoir. La définition suivante, inspirée par la lecture des rapports de l’Alliance des Civilisations, n’est pas unanimement acceptée par les spécialistes du langage, mais elle permet de comprendre de quel usage de la langue il s’agit.
La langue de bois est un effet du discours (l’utilisation de la langue) qui construit une réalité codifiée, formatée, sloganique. Cet usage de la langue permet de lisser, voire de cacher la conflictualité des rapports humains, en prenant comme référent non pas des événements réels du monde, mais des mots qui véhiculent des idées. Par exemple « le vivre-ensemble » toujours connoté positivement, contrairement à la réalité difficile de la coexistence humaine ; l’obligation de l’inclusion, qui favorise le relativisme culturel sans égard pour les différences fondamentales entre l’incluant et l’inclus, sont des exemples types de langue de bois. Enfin « l’alliance des civilisations » témoigne d’une création discursive qui dévoie complètement le sens d’« alliance » et obscurcit celui de « civilisation ».
L’une des propriétés de ce type de discours est aussi la sloganisation : une formule relevant de la consigne ou du mot d’ordre sans que l’injonction soit clairement formulée.
La langue de bois est également sujette aux croyances, aux idées dominantes, aux valeurs morales en vigueur dans une société donnée. Ceux qui l’utilisent sont aussi sujets-acteurs des discours doxiques : antiracisme, lutte contre les discriminations, lutte contre l’antisémitisme (qui est très peu mentionné dans ce rapport) et surtout islamophobie (terme propagé par l’extrême gauche européenne et les Frères Musulmans) égalé à l’antisémitisme.
Dans ce texte, comme dans un grand nombre d’autres issus de la Commissions européenne, l’usage des pronoms est intéressant : ils sont utilisés comme concepts et se transforment en injonction (paradoxale).
Les concepts et les pronoms
Nous
La valeur linguistique inclusive de ce pronom est déclarée absolue dans le texte suivant :
«Le problème est tout simplement beaucoup plus global et général: il y a eu un problème d’appréhension de l’incidence de la culture sur l’évolution historique à la fois au Nord, au Sud et, même, serait-on tenté de dire, entre le Nord et le Sud, bien que de telles provocations devraient constituer un avertissement, car, de Nord/Sud, on passe facilement à Europe/Afrique, Européens/Arabes, Chrétiens/musulmans, Christianisme/Islam, Eux/nous ou Nous/eux. La réalité à prendre en compte est cependant tout autre : c’est Nous tout court ; un Nous qui commence pour chacun avec soi-même et s’étend à tout le voisinage, en l’occurrence l’espace euro-méditerranéen, mais potentiellement à l’universel. Nous sommes citoyens d’ici et du monde, et donc de tout ce qui se trouve entre les deux, et non pas d’abord de telle ethnie ou de tel groupe de tel pays appartenant à telle région qui tous se définiraient par opposition à d’autres ».
« Nous tout court » implique l’absence d’altérité. Si tout le monde est « nous », il ne reste plus ni « eux » ni « vous », dont l’existence est fondamentale pour la construction de l’identité. Il ne reste plus aucune frontière entre les civilisations, entre les singularités culturelles qui sont invitées à se fondre dans le grand « Nous » du monde. Il n’y a plus de christianisme ni d’islam, aucune frontière entre cette totalité unique. Comment ne pas se souvenir du premier inclusiviste du monde occidental, Saint Paul, et son épître aux Galates :
« Il n’y a plus ni juif ni grec, il n’y a plus ni esclave ni homme libre, il n’y a plus l’homme et la femme, car tous, vous ne faites plus qu’un dans le Christ Jésus ».
Mais est-ce ce que cet appel est entendu par l’Autre ?
L’Autre
Ce pronom, devenu substantif, apparaît 33 fois dans le texte de 46 pages. Il peut figurer soit seul, soit au sein des groupes nominaux comme « le goût de l’Autre », « plein respect de l’Autre », « connaissance de l’Autre », « religion de l’Autre », « représentation de l’Autre », « l’ouverture à l’Autre », « la langue de l’Autre », « dialogue avec l’Autre », « la relation à l’Autre », soit au sein des groupes verbaux : « découvrir l’Autre », « aller vers l’Autre ».
Dans ces textes, « l’autre » est toujours écrit avec une majuscule. Ailleurs que dans un texte psychanalytique, cela traduit, de la part du rédacteur, une volonté inappropriée de manifester à ce mot un respect idolâtre, au prix de manipulations orthographiques répétitives : comme la sémantique, l’orthographe est manipulée au nom de l’idéologie.
L’Autre majuscule est « le grand Autre », un concept élaboré par Jacques Lacan dans ses séminaires. Le psychanalyste J.A. Miller le commente ainsi :
« Lorsque Lacan introduit le grand Autre, c’est avec cette précaution de dire que le sujet ne l’atteint jamais, mais qu’il le vise. Ce qui veut dire, comme il s’exprime d’ailleurs, qu’il me faut me contenter d’ombres.[2]»
Ce concept psychanalytique, qui implique la place et la fonction de la parole dans la construction du sujet, est différent de l’autre avec un petit a, utilisé par les psychologues et qui renvoie à une altérité. Que fait-il dans ce rapport ? Comme le disait très justement Czesław Miłosz, le « baratin » est une habitude répandue chez les intellectuels du XXe siècle. Dans cette optique, la majuscule du mot sert aux auteurs à légitimer leur statut d’intellectuels, à exhiber leur attitude quais-religieuse à l’égard de l’altérité, mais elle ne correspond à rien de psychanalytique ni de psychologique.
« Pour cela, deux conditions doivent être réunies: d’une part, chercher dans le dialogue avec l’Autre la source de nouveaux repères pour soi-même et, d’autre part, partager avec tous l’ambition de construire une “civilisation commune” par-delà la légitime diversité des cultures héritées. En un mot, et comme y invite Léopold Sédar Senghor[3], “vivre le particularisme jusqu’au bout pour y trouver l’aurore de l’universel”. Une civilisation commune a forcément l’universel, et donc l’égalité, pour horizon, tandis que le dialogue se nourrit de la diversité, et donc du goût de la différence ».
À première lecture, plusieurs questions se posent :
– Qui est l’Autre ? Quelle est sa définition, quelles sont ses frontières réelles et symboliques ?
– Comment exactement les Sages voient-ils la « civilisation commune » de l’islam pratiqué dans la majorité des pays du Sud, du judaïsme pratiqué par 79% des citoyens d’Israël, du christianisme, pratiqué encore par les pays du Nord et de la laïcité, qui est le principe défini par la constitution française ?
Après une longue introduction élogieuse sur le multiculturalisme européen qui advenait, L’Autre en question est enfin nommé. L’Autre vient du Sud, mais il n’est ni le Marocain, ni le Tunisien, ni le Maltais, ni l’Israélien, ni le Bulgare… L’autre est tout simplement le musulman. L’aspect religieux de l’altérité vers laquelle nous devons marcher devient encore plus clair, lorsque les Sages expliquent qu’il faut renforcer l’apprentissage de la langue arabe dans les écoles de l’Occident. Ni l’hébreu, ni le turc, ni le maltais, ni le bulgare (les langues des autres « grands » Autres du Sud qui figurent dans le texte). L’arabe est la langue du Coran, quelle que soit la provenance nationale des musulmans, c’est la langue sacrée du texte religieux. Convenons que si l’Alliance était aussi sincère et « diversitaire » qu’elle prétend être, elle aurait voulu renforcer toutes les langues utilisées par les pays cités, de l’hébreu jusqu’au berbère. C’est par ces petits détails que le projet, rédigé en langue de bois vertuiste[4], se trahit de manière involontaire.
Le présent et le futur
« Ces deux évolutions futures auront plusieurs effets positifs sur les perspectives d’immigration et sur la place de l’Islam en Europe. Ils mettront tout d’abord en évidence le développement d’un Islam européen, dissipant ainsi le fantasme d’une islamisation rampante de l’Europe. Cet Islam européen se construit avec des caractéristiques propres qui le distinguent de plus en plus de l’Islam tel qu’il est vécu en terre musulmane ».
En français, une religion ne prend pas de majuscule. Il ne s’agit ni de respect, ni de banalisation, juste d’orthographe. On écrit « le christianisme, le judaïsme, l’islam ». La majuscule à l’islam traduit la même tendance idolâtre pour cette unique altérité qui a, peut –être, lieu dans des textes apologétiques, mais nullement dans des rapports politiques.
Et les Sages d’expliquer comment va se passer l’acclimatation de l’Autre islamique sur le sol européen :
« En second lieu, l’installation pérenne de ces nouveaux citoyens européens de confession musulmane dans un espace laïc européen transforme graduellement leur schéma de pensée et de comportement, en particulier leurs conceptions des rapports entre la société et le religieux. Cette transformation donne sa légitimité et conduit à une aspiration à être considérés comme des “citoyens à part entière, et non comme des citoyens à part”. »
L’emploi du présent de l’indicatif contraste avec le futur du paragraphe précédent :
le rapport vise le futur proche. L’emploi du présent pour définir un fonctionnement complètement fantasmé de l’Autre, fait de celui-ci, non plus une éventualité, mais une évidence déjà présente, voire une injonction, qui est une des valeurs sémantiques du futur. (cf. « Tu ne tueras point »).
Parler de l’islam « européen » en ces termes en affirmant qu’il « se transforme » sur la terre d’accueil est, au pire de la mauvaise foi, au mieux de l’ignorance, ce qui semble peu vraisemblable vu la présence de grands connaisseurs de l’islam parmi les Sages.
La déclaration sur les « droits de l’homme en islam », adoptée en 1990 lors de la 19ème Conférence islamique des affaires étrangères, s’oppose en la matière à la Déclaration Universelle des droits de l’homme et précise :
L’article 10 : « L’islam est la religion de l’innéité. Aucune forme de contrainte ne doit être exercée sur l’homme pour l’obliger à renoncer à sa religion pour une autre ou pour l’athéisme ; il est également défendu d’explorer à cette fin son ignorance ou sa pauvreté ».
Cela signifie l’impossibilité de changer de religion, de la quitter ou de la critiquer. Ce qui est absolument contradictoire avec la liberté de conscience inscrite dans la loi européenne.
Comment résoudre la contradiction
Comment peut-on vouloir effacer la frontière qui sépare l’Autre du même alors que l’Autre islamique n’a pas besoin d’altérité, puisque son soi-même est construit sur une perfection qui ne nécessité pas d’apport extérieur. Daniel Sibony commente ainsi cette perfection :
« Le problème de l’islam avec le “devenir moderne“ se rattache à ses problèmes avec son origine, donc avec lui-même, via cette raison paradoxale : c’est que son ancrage originel est trop parfait, au sens où rien de son origine ne lui échappe : il inclut tout ce qui le précède. De sorte que dans son rapport à l’origine, là où d’ordinaire il y a faille, le Coran a pu la circonscrire, et la projeter sur ceux qui, pour lui, font faillite dans l’affrontement avec cette faille : les “autres“ (juifs, chrétiens ou païens)[5] ».
Mais de cela, le rapport des Sages ne dit mot. Mieux, il escamote grossièrement la contradiction qui est posée entre l’Autre et le fonctionnement de l’Occident. En effet, le Nord (l’Occident) s’affirme ouvert à la diversité, aux autres cultures, à l’islam. Cette logique exige d’accepter l’islam en bloc. Mais, l’Occident compte, parmi ses valeurs, la liberté de conscience et l’égalité entre hommes et femmes. Or, certaines pratiques musulmanes ne sont pas compatibles avec celles valorisées par l’Occident. L’islam sanctionne l’apostasie, réprouve les mariages mixtes avec des non-musulmans. Cela va à l’encontre des valeurs occidentales. Que faire ? Le texte du rapport montre la voie pour que l’Autre se sente chez lui en Occident et que les Occidentaux se sentent « Autres » chez eux.
Réformer l’école
Le rapport des Sages préconise la refonte de l’éducation pour intégrer l’Autre. Parmi les préconisations, l’apprentissage de la langue arabe.
« Nous demandons également un effort particulier aux États de la rive Nord de la Méditerranée pour promouvoir au sein de leurs populations scolaires l’apprentissage des langues du Sud de la Méditerranée et notamment l’arabe »
Réécrire l’Histoire
« Cet effort de rapprochement des contenus pédagogiques de l’enseignement scolaire devrait être le prélude à une action en profondeur à plus long terme : la construction dans le domaine des sciences humaines d’un socle de savoirs communs et non plus simplement partagés. Il s’agira de procéder à une véritable refondation des sciences humaines, de revisiter en profondeur l’Histoire de la région méditerranéenne dans ses dimensions anthropologique, juridique, culturelle, religieuse, économique, sociale, de sorte que toutes les interprétations tendancieuses, toutes les ambiguïtés trompeuses du langage et du vocabulaire, toutes les fausses vérités, toutes les images déformées de l’Autre, toutes les marques de défiance réciproque et leurs exploitations politiques et idéologiques soient repérées et mises à l’écart, non pas pour les occulter, car les mensonges font aussi partie de l’Histoire, mais pour les présenter comme tels ».
La réécriture de l’histoire est largement pratiquée en Occident en faveur de l’Autre et en effaçant le Même depuis très longtemps. Le rapport préconise par exemple « la révision des livres scolaires et universitaires ». Cela a été bien mis en place par exemple par le renforcement de l’enseignement du mythe de la “ convivencia“ des Juifs, des chrétiens et des musulmans sous l’islam en Andalousie. Pourtant, le mythe andalou est largement battu en brèche par les historiens aussi importants que Bat Ye’or, Paul Fenton depuis bien avant l’époque où a été écrit ce rapport. Les Sages, parmi lesquels Umberto Eco, grand connaisseur de l’histoire, pourraient-ils l’ignorer ? Leur préconisation a été sagement appliquée tout au long de la première décennie du XXIe siècle pour aboutir aujourd’hui à une exposition consacrée à ce mythe à l’Institut du Monde Arabe[6].
Le révisionnisme préconisé s’est donc installé, malgré les travaux très récents de Joseph Perez, Serafin Fanjul, Darío Fernández-Morera, qui démontrent un réel opposé.
Créer des associations
« Il y a l’influence profonde et durable du milieu familial, local ou associatif, qui peut être décisive et venir parfois même contredire ou interdire la mise en pratique des efforts consentis à l’École pour accéder à la connaissance réciproque. Il est donc erroné de penser que l’Éducation s’arrête aux portes de l’École. Il faut aussi un effort particulier en direction des familles, des parents notamment, des adultes en général et aussi tout ce qu’on regroupe sous l’appellation non contrôlée de « secteur éducatif informel ».
Le financement est demandé pour la création des associations qui suppléeraient à l’école. L’activisme des parents musulmans est ainsi encouragé et la création des associations à tendance prosélyte est favorisée. Comme par coïncidence, le CCIF (le collectif contre l’islamophobie en France), proche de la mouvance des Frères Musulmans, a été créé en 2003 dans la droite ligne des préconisations des sages. Ce collectif a été dissous par l’État français après avoir joué un rôle important dans la décapitation de Samuel Paty.
Utiliser les médias
« Promouvoir des canaux et relais de diffusion locale dans les pays du Sud et, au-delà, encourager la création de “chaînes de voisinage“ selon des modalités qui encouragent le rôle de pont entre les populations immigrées et les pays du Sud dont elles sont originaires, tout en prévenant le risque de “communautarisme“ ».
Les médias qui font “le pont“ sont nombreux. À titre d’exemple, Al Jazeera en français. Une chaîne qatarie, située au Sénégal, propose à ses téléspectateurs francophones un large spectre d’émissions sur le monde arabe en se focalisant sur la diabolisation d’Israël et en l’accusant de tous les malheurs des pays du Sud.
Conclusion
Fadila Maaroufi, directrice de l’Observatoire des Fondamentalismes de Bruxelles, a fait une remarque pertinente, à la fin d’une conférence de Bat Y’eor sur la dhimmtude. La dhimmitude est contraire aux valeurs occidentales, elle ne peut pas exister dans une société démocratique. Fadila Maaroufi, qui connaît le milieu musulman de l’intérieur, a remarqué que la grande majorité des musulmans européens considère que la dhimma est un cadeau fait aux mécréants par la sharia et qu’il ne peut pas y avoir d’égalité entre les musulmans et les mécréants. Cette idée est très cohérente avec la position de l’islam en général, où il n’y a pas de place pour l’Autre, car pour qu’il existe, il faut que le Même ait des failles, qu’il soit imparfait. Les résultats de cette ignorance de la civilisation de l’Autre se font voir tous les jours sur le sol européen.
Bibliographie
Bat Y’eor (2017), Le dhimmi, Paris, Les Provinciales.
Iribarne, Philippe (2019) Islamophobie : intoxication idéologique, Paris, Albin Michel.
Sibony, Daniel (1997), Les trois monothéismes, Paris, Seuil.
Taguieff, Pierre-André (2015), Une France antijuive ? Paris : CNRS
del Valle Alexandre (2018), La stratégie de l’intimidation, éd. L’Artilleur, Paris.
[1] « La visite d’Arafat en Belgique. Une cérémonie est organisée par l’ambassadeur du Maroc. Les chaînes de télévision sont là. Dans la file pour aller le saluer, mon mari me dit : ‘Surtout ne le laisse pas t’embrasser. Ça passera mal dans la communauté’. Arrivée près d’Arafat, il me serre la main puis, on lui présente David Susskind et là Arafat se jette dans ses bras ! » http://coj.be/simone-susskind/
[2] https://www.cairn.info/revue-la-cause-freudienne-2006-3-page-137.htm
[3] La citation de Senghor est hautement symbolique, non seulement parce qu’il s’agit d’une référence « humaniste », mais aussi parce que Léopold Senghor a été l’un des premiers à reconnaître l’Autonomie Palestinienne et à accueillir Arafat au Sénégal.
[4] Le vertuisme fait de l’exercice de la vertu un travail d’accomplissement de soi, souverain bien où se réconcilient la vie heureuse et la perfection morale.
[5] Sibony, D. (1997 ), « Les trois monothéismes », p. 82
[6] Voir Pierre Lurçat https://mabatim.info/2021/11/25/le-mensonge-du-vivre-ensemble-et-la-reecriture-de-lhistoire-juive-en-terre-dislam-par-linstitut-du-monde-arabe/